|
Conflit et lien social Agôn, cest la lutte, le concours, la rivalité dans tous les domaines, lopposition. Mais cest aussi le lien qui unit les adversaires. Agôn, cest encore la gratuité, le combat pour la gloire, cest-à-dire pour rien. Du point de vue agonistique, être humain signifie simplement refuser de se soumettre à quoi que ce soit, dabdiquer devant lautre comme devant la nécessité. En Agôn, pour conjurer la domination, les combattants rivalisent, en face-à-face, avec tout ce qui prétend simposer. Jean-Luc BOILLEAU, collaborateur du M.A.U.S.S. et auteur de nombreux articles sur le sport et la rivalité, est né en 1948 à Casablanca. Docteur en sociologie, il enseigne celle-ci à luniversité de Perpignan et la philosophie au lycée Arago de cette même ville. Il a été international de judo à la fin des années soixante. |
|
Don, intérêt et désintéressement En tant quhommes et femmes modernes nous nous trouvons écartelés entre deux séries de certitudes et dexigences parfaitement inconciliables. Dune part, notre époque nous pousse impérieusement à croire que rien néchappe à la loi toute puissante de lintérêt et quil nous faut nous-mêmes nous y plier en devenant des « calculateurs » avisés. Dautre part, nous aspirons tous à nous y soustraire pour accéder enfin à cette pleine générosité, à ce don pur et entier, que la tradition religieuse dont nous sommes issus nous enjoint de rechercher. Mais cest là une tâche impossible, rétorque la première croyance pour qui rien néchappe au calcul, si bien quil ne saurait exister de générosité et de don que mensongers. Alain CAILLÉ, né en 1944, est professeur de sociologie à luniversité de Paris-X-Nanterre, et enseigne également, en économie, à Paris-I. Directeur de La Revue du M.A.U.S.S., il est notamment lauteur de Splendeurs et Misères des sciences sociales (Droz, 1986), de Critique de la raison utilitaire (La Découverte, 1989) et de La Démission des clercs (La Découverte, 1993). Il est aussi le co-auteur avec Jacques T Godbout de LEsprit du don (La Découverte, 1992). |
|
Don et économie solidaire À lheure dune mondialisation qui, pour le meilleur ou pour le pire, semble devoir tout emporter sur son passage, il est urgent de rappeler que le lien social ne peut pas être fondé exclusivement sur lutilitarisme. Et que, même en matière déconomie, à côté du principe marchand, il faut faire place à la logique de la redistribution comme à lesprit de la réciprocité. En sinspirant des travaux des courants de pensée qui se réclament de léconomie solidaire et du M.A.U.S.S. (Mouvement Anti-Utilitariste dans les Sciences Sociales) G. Carvalho et S. Dzimira donnent ici les moyens danalyser les modes darticulation nécessaires entre marché, État et don. |
|
Justice, don et association Peut-on penser et rendre effective l'exigence de la justice et de la démocratie en faisant l'hypothèse que nous sommes tous essentiellement des calculateurs impénitents, avant tout soucieux de leur seul intérêt personnel ? Oui, répond le libéralisme contemporain qui, de John Rawls à John Harsanyi ou David Gauthier s'efforce de dessiner les traits d'une juste démocratie réduite à des règles de coexistence pacifique entre ces sujets « mutuellement indifférents », si caractéristiques de l'actuelle société de marché. Non, objectent les « communautariens » et les républicains, qui en appellent à la nécessité d'une conception du bien commun partageable par tous, au risque de sembler vouloir ressusciter le fantôme de la société close d'antan |
|
Comment pensent les institutions Les institutions pensent-elles ? Et, si oui, comment font-elles ? Ont-elles un esprit en propre ? Dans ce livre, Mary Douglas prend à bras-le-corps toutes ces questions pour jeter les bases dune théorie des institutions. On explique dordinaire le raisonnement humain par les propriétés de la pensée individuelle. Mary Douglas se focalise, elle, sur la culture et nous entraîne dans un parcours provocateur et passionné, placé sous le double patronage de la sociologie dÉmile Durkheim et de la philosophie des sciences de Ludwik Fleck. Doù il ressort que nous aurions tort de croire que seule la pensée des peuples primitifs serait modelée par les institutions, tandis que notre modernité, elle, verrait advenir une pensée véritablement individuelle. Les questions essentielles, les décisions de vie ou de mort par exemple, ne peuvent jamais être résolues à un niveau purement individuel. Mary DOUGLAS, anthropologue, a enseigné aux universités de Londres, Columbia, Northwestern et Princeton. Ses travaux dafricaniste lui ont valu la Memorial Medal du Royal Institute. Elle a publié une quinzaine douvrages, dont De la souillure (Maspero, 1971 ; La Découverte, 1992), un des classiques de lanthropologie, et dautres titres consacrés à la logique des catégories de pensée (Natural Symbols, 1970 ; Implicit Meanings, 1975), au rapport de nos sociétés au risque (Risk and Culture, avec Aaron Wildavski, 1982) ou à la consommation (The World of Goods, avec Baron Isherwood, 1979). |
|
Le Naufrage de lUniversité Il nest peut-être pas de réforme plus urgente que celle de lUniversité. Mais pas de réforme non plus qui semble aussi irrémédiablement vouée à léchec. Nest-ce pas là leffet du profond fossé qui sest creusé entre lidéal sur lequel sest édifié lUniversité et sa réalité actuelle ? Lidéal était celui dun lieu délivrant une culture désintéressée et un savoir ayant valeur universelle. La réalité est aujourdhui celle dun savoir « utilitaire », dont on ne retient que lefficacité pragmatique. Sabolit ainsi la différence entre science et technique, nature et société, être et devoir être. Si lon veut une vraie réforme de lUniversité, on ne fera donc pas léconomie dune réflexion épistémologique approfondie sur cet écart béant entre lidéal et la réalité. Michel FREITAG, né en Suisse à La Chaux-de-Fond, ancien chercheur au CNRS, est depuis 1971 professeur de sociologie à lUniversité du Québec à Montréal. Animateur au Québec du " Groupe détudes sur la postmodernité ", il est également le directeur de la revue Société. Outre de nombreux et importants articles, il est notamment lauteur de Dialectique et société (LAge dHomme/Saint-Martin, Lausanne/Montréal, 1986). |
|
Le don, la dette et lidentité Dans LEsprit du don, Jacques T. Godbout montrait que le don occupe encore une place de première importance dans nos sociétés, à côté du marché et de lÉtat. Dans ce nouvel ouvrage, il généralise son propos : le don est ce mode de circulation des biens et services propre aux réseaux et où nintervient pas la séparation entre un public et des professionnels. Dans la famille ou dans la société, le monde des réseaux fonctionne au don et à la dette, et non pas à léquivalence (comme dans le marché) ou à légalité (comme dans lÉtat). Quand les réseaux fonctionnent bien, cette dette est positive : elle nengendre pas angoisse et aliénation, mais confiance et désir de loyauté. Le don apparaît ainsi indissociable du sens : cest lintention qui compte et cest le sens qui fait le don. Enfin, cest à travers la relation de dette (positive ou négative), de don et de contre-don, que se forment ou se déforment les identités. Jacques T GODBOUT, professeur-chercheur à lInstitut national de la recherche scientifique (Université du Québec), est lauteur de La participation contre la démocratie (Saint-Martin), La démocratie des usagers (Boréal) et, en collaboration avec Alain Caillé, de LEsprit du don (La Découverte/Boréal). Considéré comme un des meilleurs spécialistes mondiaux de la sociologie du don, J. T. Godbout est membre du comité de rédaction de La Revue du MAUSS. |
|
La Guerre des identités Depuis deux siècles au moins, lobjectif premier de la lutte politique avait été celui de la libération : peuples, classes ou individus, tous les sujets de laction politique naspiraient quà sémanciper. Cette visée de la libération affirmait en même temps le principe de légalité de tous les êtres humains, dessinant ainsi la figure de luniversalisme : dans les « jeux de langage » de la politique moderne, légalité lemportait sur les différences. Or, miné par ses contradictions internes, ce discours de lémancipation se décompose aujourdhui : la guerre des identités de genre, dorigine ou de culture prend le pas sur la lutte pour légalité. Que ce soit aux États-Unis, avec le débat sur le multiculturalisme, en Suisse ou en Autriche où progressent les discours xénophobes, ou dans nombre de pays musulmans, partout cest la revendication de lidentité culturelle qui saffirme et prend le pas sur lidéal dégalité. Dorigine argentine, professeur émérite à luniversité dEssex, Ernesto LACLAU est considéré en Amérique latine et aux États-Unis comme un des principaux théoriciens du politique. Il est lauteur de nombreux ouvrages, dont, avec Chantal Mouffe, Hegemony and Socialist Strategy, un classique des départements de philosophie et de sciences politiques dans le monde universitaire anglo-saxon. |
|
La Mégamachine La plus extraordinaire machine jamais inventée et construite par lhomme nest autre que lorganisation sociale. Sous légide de la main invisible, techniques sociales et politiques dune part (de la persuasion clandestine publicitaire au viol des foules par la propagande, démultipliées par les autoroutes de linformation et les satellites), techniques économiques et productives dautre part (du fordisme au toyotisme, de la robotique à la biotechnologie) séchangent, fusionnent, sinterpénètrent. Elles sarticulent désormais en un gigantesque réseau mondial mis en uvre par des firmes et des entités transnationales qui soumettent États, partis, sectes, syndicats, ONG, etc. Lemprise de la rationalité technoscientifique et économique donne à lensemble une ampleur inédite et en fait une « mégamachine » jamais vue dans lhistoire des hommes. Serge LATOUCHE, un des animateurs de La Revue du M.A.U.S.S., est professeur à luniversité de Paris-XI (Sceaux) et à lIEDES (Institut détude du développement économique et social, Paris-I). Spécialiste du tiers monde et de lépistémologie des sciences sociales, il est lauteur, notamment, de Critique de limpérialisme (Anthropos, 1979), Faut-il refuser le développement ? (PUF, 1986), Loccidentalisation du monde (La Découverte, 1989) et La Planète des naufragés (La Découverte, 1991). |
Page précédente | Retour haut de la page | Page suivante |